Posté le Dimanche 17 août 2014
Ne t’inquiète pas pour moi
Alice Kuipers
Albin Michel Jeunesse
Ma note : 17/20.
« Pourquoi ce titre ? Pourquoi ne faut-il pas s’inquiéter ? »
Mon résumé
Dialogue, ou plutôt échange de post-it entre une mère et sa fille. Liste de courses, petits poèmes, mots d’amours, ou crises de nerf rythment ces papiers. Tout y passe, les deux femmes s’accommodent de ce mode de vie et regrettent de peu se voir : la mère est sage-femme et sa fille Claire est partagée entre le lycée, ses amis, le baby-sitting…
Mon avis
Au premier abord, sa forme narrative paraît légère. En effet à chaque page l’on y retrouve un post-it laissé par Claire ou pas sa mère.
J’avoue avoir été surprise au début par ce texte laconique à trou qui ne parle que des petites choses de la vie… Mais petit à petit, tous ces vides se sont remplis et sont devenus d’une incroyable densité…
Et Bien que vite lu, cette lecture ne fut pas si légère que cela ; bien au contraire, c’est de l’émotion condensée, à ne pas lire n’importe quand, dans n’importe quelle situation. Il faut être en paix, avoir le moral bien solide, pour en apprécier toutes les finesses et rester objectif.
Nous imaginons bien à quelles situations les petits mots font référence et nous suivons pas à pas les émotions contrastées d’une mère en train de mourir d’un cancer et de son adolescente de fille qui l’accompagne comme elle peut.
Ce livre sonne juste.
Ce curieux procédé stylistique met en évidence le manque, le silence, l’absence, la difficulté d’être ensemble, de se parler et de communiquer… En même temps, il montre que ce peut-être un moyen de continuer à tisser des liens quand se parler devient trop difficile.
Les deux femmes se croisent, toutes deux prises par des emplois du temps « over-bookés ».
C’est le métier de sage-femme de la mère et les tours de garde qu’il implique qui installe l’habitude des petits mots quotidiens collés sur le frigo dans cette famille monoparentale.
A l’arrivée de la maladie, c’est par le biais de cette écriture concise et précise comme la liste des courses que se diront les craintes et les angoisses, que s’expliqueront les silences et que se dira l’amour qui unit la mère et la fille.
Confronté directement à ces traces de rien qui finissent par devenir des concentrés d’essentiel, le lecteur est happé par l’émotion.
Ce livre marque par sa force et son originalité.
Au fur et à mesure de l’avancée de ma lecture, j’avais la nette impression que non seulement mère et fille ne se croisent jamais, mais surtout qu’elles n’arrivent pas à se parler normalement.
« Je suis rentrée, j’ai lu ton mot, je suis allée à la porte de derrière, je t’ai regardée dans le jardin, et je n’ai pas pu te parler, Claire. (…)Mais je ne trouve pas la force de te répéter en face ce que m’a dit le médecin. Je suis désolée. »
Nous sommes devant une adolescente vraisemblablement confrontée pour la première fois à la Maladie, et de très près de surcroit. Elle semble parfois, au début tout du moins, comme pas tout à fait consciente, au regard de ses actes et ses propos. Mais qui le serait dans pareille situation ? Bien que pouvant être maladroite, Claire, crie son amour à cette mère qui s’en va. Elle n’a pu trouver autre chose que ces post-it collés sur le frigo. C’est déjà beaucoup.
« Je n’ai pas besoin de grandes vacances. Je veux juste que tu ailles mieux. Je t’embrasse fort, Claire. »
La mère en fait de même.
Toutes ces choses qu’on ne peut se dire de vive voix, les yeux dans les yeux, que l’on s’écrit. La peur de soi ? La peur de l’autre ? La pudeur ? A chacun sa manière de communiquer, de montrer son amour, d’exprimer ses regrets, et de laisser une lueur d’espoir aussi…..
« Je reste optimiste tout en me préparant au pire, maman. Ça te semble bien, comme compromis ? «
Conclusion
Ce roman par post-it touche bien plus que de longs discours sur la maladie.